Accepter ses besoins ≠ être faible
- Florence
- 8 juin
- 3 min de lecture
Dans un monde qui valorise la performance, l’adaptabilité, la flexibilité à tout prix, nommer ses besoins peut paraître suspect. Ou pire : inconfortable.
Et pourtant… Chez de nombreuses personnes autistes, cette pression à l’effacement est vécue dès l’enfance. Parce que les besoins sont « trop précis », « trop intenses », ou juste « pas comme les autres ». Résultat : demander devient difficile. S’écouter devient honteux. Et s’effondrer devient inévitable.
Mais si vos besoins sont là, ce n’est pas pour déranger. Ils sont là pour vous protéger.
Ce n’est pas du confort, c’est de la régulation
Dans le cadre de l’autisme, les besoins ne sont pas des préférences superficielles. Ce sont des variables de régulation. C'est tout le système neurologique qui est en surcharge, pas un caprice, une envie ou une préférence.
Exemples concrets :
Un casque anti-bruit ? Ce n’est pas une coquetterie. C’est un moyen de survivre à la surcharge sonore.
Avoir une routine fixe ? Ce n’est pas du contrôle excessif. C’est un repère vital dans un monde imprévisible.
Rester seul·e à une fête ? Ce n’est pas du snobisme. C’est éviter la crise.
📚 Plusieurs études ont mis en évidence l’impact de l’environnement sensoriel sur le stress des personnes autistes : (Brown & Dunn, 2002 ; Schaaf et al., 2011). La surcharge sensorielle augmente les taux de cortisol, l’hormone du stress, de manière significative (Corbett et al., 2006).
💬 Les petites phrases qui blessent
« Il faut que tu sortes de ta zone de confort. »« Tu ne peux pas toujours faire comme tu veux.» « Dans la vie, faut savoir s’adapter. »
➡️ Ces phrases sont peut-être dites avec bienveillance, mais elles invalident des efforts déjà immenses.Pour une personne autiste, la simple présence dans un open space, une réunion familiale ou un supermarché peut être un exploit. Ce qui semble « petit » pour les autres est parfois un pic à escalader sans corde.
Le pire ? C'est de véhiculer la croyance que la croissance ne se fait que hors de la zone de confort. C'est faux. Des humains exceptionnels, potentiellement autistes, comme Jane Austen, Benjamin Franklin ou Einstein ont révolutionné leurs domaines depuis le centre même de leur zone de confort.
🛠 Besoins ≠ fragilité
Accepter ses besoins, ce n’est pas renoncer à évoluer. C’est simplement s’appuyer sur des piliers stables pour avancer.
Besoin d’anticipation : permet de réduire les comportements d’évitement liés à l’anxiété (Wigham et al., 2015).
Besoin de stimming : permet l’autorégulation neurologique en cas de surcharge.
Besoin d’un temps de retrait : favorise la récupération post-crise ou post-interaction.
Plutôt que de les cacher, les intégrer consciemment dans votre quotidien vous rendra plus fort·e — pas plus faible. C'est autant d'énergie récupérée, de force mentale à dépenser ailleurs. Se connaître, se respecter : c'est le pouvoir de contrôler son vécu, son cerveau, sa neurologie.
🌱 Se respecter pour se renforcer
La société valorise ceux qui “donnent tout”, “se dépassent”, “ne comptent pas leurs efforts”. Et vous savez quoi ? Personne n'y arrive. Aucun humain, même neurotypique n'est à fond, au max 24h/24, 7 jours sur 7 et pendant 90 ans. Il n'y a que les machines qui peuvent performer sans variabilité de leurs capacités. Mais vous ? Vous n’êtes pas une machine.
Vous avez le droit de choisir vos contextes. Le droit de dire “non”. Le droit d’avoir besoin d’un lieu, d’un silence, d’un rythme.
Et ce n’est pas de la fragilité. C’est de la lucidité. C’est de la puissance.
En bref
Vos besoins sont légitimes.
Les écouter, ce n’est pas fuir la vie. C’est vous rendre la vie vivable.
Ce qui vous apaise est plus précieux que ce qui vous rend "normal·e".
Et surtout : vous n’avez rien à prouver pour mériter d’aller bien.
📚 Pour aller plus loin
Corbett, B. A., Mendoza, S., Abdullah, M., Wegelin, J. A., & Levine, S. (2006). Cortisol circadian rhythms and response to stress in children with autism. Psychoneuroendocrinology.
Schaaf, R. C., Benevides, T., Kelly, D., & Mailloux, Z. (2011). Occupational therapy and sensory integration for children with autism: A feasibility, safety, acceptability and fidelity study. Autism.
Brown, C., & Dunn, W. (2002). Sensory Profile Manual. Psychological Corporation.
Wigham, S., Rodgers, J., South, M., McConachie, H., & Freeston, M. (2015). The interplay between sensory processing abnormalities, intolerance of uncertainty, anxiety and restricted and repetitive behaviours in autism spectrum disorder. Journal of Autism and Developmental Disorders.
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