L'autisme et le verbal, c'est un peu comme le Soleil et la Lune dans la chanson de Trenet. Ça se croise, se mêle, s'entremêle ... Certains vont parler énormément et dire très peu, ou parler peu et dire beaucoup ... La parole, c'est tout un enjeu dans l'approche du TSA, et d'autant plus dans les cas où cette parole est difficile à faire sortir.
Comprendre pourquoi
Alors pourquoi les autistes ont tous un rapport singulier à la parole. des plus verbaux, au moins verbaux, on retrouve toujours des traits communs : ré-utilisation de phrases entendues dans des films, lues dans des livres, rejet des conversations inutiles, des difficultés à garder le fil de ce que vous voulez dire ... et surtout : l'immense complexité à dire ce que vous pensez.
Beaucoup de professionnels parlent d'incapacité", de "faiblesses langagières" ... À mon sens c'est une incompréhension de la réalité intérieure de l'autisme. L'autiste n'a pas du mal à dire parce qu'il a du mal à penser dans les formes de TSA sans déficit intellectuel.
Les autistes ont du mal "à dire" essentiellement parce que ce sont les mots qui ont du mal "à décrire".
Une pensée autiste peut être en réalité 3 pensées simultanées, combinées à une odeur, le souvenir d'un lieu et une chanson. Je vous mets au défi de réussir à décrire de façon synthétique et socialement adaptée ce genre de choses 😅
La vraie problématique ?
Choisir ce que vous avez BESOIN de dire. Et ce n'est pas une mince affaire. Il faut arbitrer entre ce que vous pensez, ce que vous avez envie de dire, et ce que les autres doivent entendre. C'est complexe.
La première chose à mettre en place : c'est de savoir expliquer à votre entourage ce que vous ressentez, et ce dont vous avez besoin. Et le moyen d'y parvenir ? D'arriver à trier vos pensées, pour apprendre à identifier et mettre en mots simples ce qui doit être dit pour que votre entourage puisse comprendre et aider si besoin.
Voici quelques idées pour vous entrainer à verbaliser plus et mieux :
Écrivez !
Le jour 1 de la découverte de votre autisme : il vous faut un journal. Un objet qui vous plait, auquel vous avez un rapport positif. Pour y rassembler vos observations, vos pensées et toutes les activités que vous pouvez mettre en place pour mieux vivre votre TSA.
Essayez cette activité :
Décrivez votre journée comme elle vous vient en un petit paragraphe
Surlignez les aspects qui vous paraissent les plus utiles à retenir ou partager à vos proches
Réécrivez les en un minimum de mots, jusqu'à ce que la phrase ne tienne qu'en une seule ligne
L'intérêt : synthétiser (évidemment), mais surtout apprendre à accepter que la synthétisation pousse à une imprécision langagière, par soucis d'efficacité. Ce qui au fil du temps, vous aidera à verbaliser de façon plus directe. (Vous verrez des améliorations en environ 10 jours).
Jeux de rôles
Vos personnalités sont riches par nature, et pleines de fantaisies qui font tout votre charme. Utilisez cette force que beaucoup n'ont pas. Choisissez un objet, et avec vos proches, avec humour et légèreté, faites parler ces objets.
Une de mes patientes a notamment une peluche bébé licorne qui s'appelle "Autistina", et avec les mots simples qu'on peut imaginer qu'un bébé licorne aurait, elle explique son autisme.
L'intérêt : le côté enfantin dédramatise (pour vos proches surtout), et pour vous permet d'accepter un langage parfois imprécis, ou pas exhaustif. Et grâce à cette mise à distance rigolotte et sans prise de tête, vous aurez davantage de facilité à dire ce que vous ressentez.
Jeux de société
Les jeux de société qui peuvent avoir un lien avec vos intérêts spécifiques sont un outil inestimable pour parler plus. Un trivial poursuite à thème par exemple, vous permet d'échanger (lire les questions, répondre, commenter les réponses), sans pour autant vous mettre en difficulté.
L'intérêt : c'est toujours plus simple de parler de quelque chose qui vous passionne que de vous même, ou d'émotions que vous pouvez peiner à identifier. Le jeu de société représente une interaction sociale safe. Vous connaissez les codes et règles, et ne pouvez pas être surpris par quelque chose d'imprévu. C'est une porte d'entrée idéale pour parler plus.
Et SURTOUT : ne vous complexez pas. La communication est un domaine qui vous est forcément complexe d'une manière ou d'une autre. Respectez votre rythme, mais surtout vos envies. Si vous ne ressentez ni le besoin ni l'envie de communiquer davantage : ne vous y forcez pas. Aucune action ne vous sera bénéfique si elle devient un déclencheur.
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