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Différencier le TSA et le trauma : une nécessité clinique et humaine

  • Photo du rédacteur: Florence
    Florence
  • il y a 3 jours
  • 3 min de lecture

Il est fréquent que les personnes en questionnement sur leur neuroatypie s’interrogent : suis-je autiste ou suis-je traumatisé·e ? La confusion est compréhensible : certains signes semblent se ressembler en surface — hypersensibilité, dissociation, routines, méfiance sociale… Mais ces ressemblances ne sont qu’apparentes. Les mécanismes sous-jacents, eux, sont profondément différents. Et c’est justement cela qu’il est urgent de comprendre.


Cet article vise à clarifier ces distinctions à partir des recherches en neurosciences, psychologie cognitive et psychopathologie, afin d’éviter les fausses pistes diagnostiques et d’aider chacun à avancer vers une meilleure compréhension de soi.


1. Hypersensibilité sensorielle : structurelle ou contextuelle ?


L’hypersensibilité est un point commun souvent évoqué. Mais sa forme change radicalement selon le contexte neurodéveloppemental ou traumatique.


  • Dans le TSA, l’hypersensibilité est transversale, présente depuis l’enfance, et touche potentiellement tous les canaux sensoriels (auditif, visuel, tactile, proprioceptif, etc.). Elle est structurelle, liée à une hyperconnectivité neuronale (Tavassoli et al., 2014) et à une inefficacité de la modulation sensorielle par le thalamus.

  • Dans le trauma, l’hypersensibilité est contextuelle. Elle s’active surtout en présence de déclencheurs associés à l’événement traumatique (bruit, voix, posture, odeur), et résulte de la mémoire implicite traumatique (Jaffe et al., 2019), en lien avec l’amygdale et l’hippocampe.


2. Dissociation et déconnexion : mécanisme défensif ou surcharge progressive ?


  • Dans le TSA, la dissociation est rarement centrale, mais on observe souvent des états de shutdown en cas de surcharge sensorielle ou cognitive. Il s’agit d’un phénomène progressif, lié à l’épuisement des capacités d’autorégulation. Le cerveau autistique n’éteint pas les émotions : il est submergé sans parvenir à les exprimer (Kinnaird et al., 2019).

  • Dans le trauma, la dissociation est un mécanisme protégeant de la reviviscence, avec une déconnexion émotionnelle aiguë. On parle d’“effondrement parasympathique” (Van der Kolk, 2014), qui se manifeste par une impression de flotter hors de soi, de regarder la scène de l’extérieur, souvent sans signe visible pour l'entourage.


3. Méfiance sociale : lisibilité ou danger perçu ?


  • Dans le TSA, la méfiance sociale est une conséquence de la difficulté à décoder les intentions d’autrui. Ce n’est pas un refus du lien, mais un manque de lisibilité des règles implicites, ce qui pousse à l’évitement par fatigue ou erreur d’interprétation (Livingston et al., 2019).

  • Dans le trauma, la méfiance est souvent acquise, et ciblée. Elle est dirigée vers certains profils (autorité, hommes, figures maternelles…), en écho au vécu traumatique (Herman, 1992). Elle peut même se transformer en hypervigilance, sans que les codes sociaux soient altérés


4. Besoin de contrôle et routines : système interne ou prévention du danger ?


  • Dans le TSA, les routines rassurent car elles répondent à un besoin de prédictibilité neurologique. Elles offrent un cadre fixe qui régule l’anxiété et structure le temps selon une logique interne (South et al., 2007).

  • Dans le trauma, les routines peuvent aussi exister, mais comme mécanisme défensif pour éviter l’imprévisible, souvent associé au danger. C’est la logique du “si je contrôle tout, je reste en sécurité” (Cloitre et al., 2011).


5. Codes sociaux : effort vs désengagement


  • Chez les personnes autistes, les codes sociaux ne sont pas intuitifs : ils sont souvent acquis par observation ou mimétisme, au prix d’un grand effort cognitif. Leur usage est coûteux, notamment en cas de camouflage (Livingston et al., 2019).

  • Dans le trauma, ces codes sont généralement intacts, mais leur usage peut être interrompu par fatigue, anxiété ou évitement émotionnel. Il ne s’agit pas d’un manque de compétence sociale, mais d’une forme de retrait affectif (Cloitre et al., 2006).


6. En résumé : structure vs blessure


TSA

Trauma

Trouble neurodéveloppemental

Trouble acquis, lié à un événement

Difficultés présentes depuis toujours

Rupture après un “avant” et un “après”

Fatigue cognitive chronique

Réactivité émotionnelle au souvenir

Pas de mal-être sans déclencheur

Mal-être persistant même sans déclencheur

Codes sociaux appris

Codes sociaux intacts mais désactivés

Et si on a les deux ?

C’est possible, et même fréquent. Le TSA est parfois un terrain vulnérable aux traumas. Mais pour autant, il ne faut pas les confondre.

En thérapie, un diagnostic différencié permet de choisir l’axe prioritaire à traiter (ex. EMDR pour le trauma, TCC adaptée pour l’autisme). Mais il faut éviter de tout aborder en même temps, sous peine d'épuisement émotionnel.


TSA et trauma peuvent se croiser, mais ne doivent jamais être confondus. Distinguer les deux, c’est rendre justice à la singularité de chaque vécu — et surtout, donner des pistes d’accompagnement justes, respectueuses et efficaces.

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